L'Homme a depuis longtemps recherché les épices, d'abord pour chasser les insectes (rites funéraires), puis en médecine, ou comme conservateurs des aliments, avant d'être utilisées comme aromates dans l'art culinaire. Leur commerce était basé, au début, sur le troc, puis donna lieu à des échanges monétaires (1). |
(1 )Le terme «payer en espèces» viendrait de «payer en épices». Les deux mots ont la même racine en latin : species, qui au pluriel veut dire à la fois "épices" et "marchandises" . |
Les épices rentrent dans l’histoire moderne avec les grands navigateurs poussés par les commerçants et les princes à rechercher des voies maritimes moins onéreuses et plus sûres que les voies de la «Route de la soie». De ce moment, les épices vont dominer la navigation occidentale jusqu’au XIXe siècle au travers des découvertes, de l’installation des comptoirs puis plus tard des colonies, de la création des grandes Compagnies des Indes et des batailles navales pour la conquête des terres lointaines. |
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En effet, jusqu'au milieu du XVe siècle, seuls les Chinois, les Indiens, les Arabes, les Byzantins, les Génois et les Vénitiens ont commencé à s'aventurer sur la mer.
Les Portugais vont relever le défi, se lançant sur les nouvelles ,mais oh combien aventureuses, routes maritimes qui, d'étape en étape, vont les mener vers l'Afrique, puis aux Indes, à Malacca, dans le golfe Persique et enfin dans les îles où poussent la cannelle, le clou de girofle, le poivre, le gingembre, la vanille, la noix de muscade, le bois de santal, etc. |
On citera Gil Eanes de Lagos (qui, le premier, doubla le redoutable Cap Bojador en 1434, cf. Journal des Savants, Institut de France, 1841), Diégo Caô (qui franchit l’Equateur et atteignit l'embouchure du Congo en 1482), Bartholomeo Dias (qui découvrit, en 1488, le Cap Tormentoso ou Cap des Tempêtes, plus connu sous son nom actuel de Cap de Bonne Espérance, cf. Bulletin de la Société de Géographie), Vasco de Gama (qui lui aussi, dix ans plus tard, franchit le Cap de Bonne Espérance, puis remonta la côte orientale de l'Afrique, escalant au Mozambique, puis au Kenya et, après 23 j de navigation sans apercevoir la moindre terre, atteignit la côte de Malabar où il fit jeter l'ancre devant Calicut ou Kozhikode le 20 mai 1498... il venait d'ouvrir la Route des Indes), Pero Alvares Cabral (qui découvrit en 1500, un peu par chance semble-t-il, le Brésil aussi connu sous le nom de "Terre des Perroquets") ou encore le fondateur de l'empire portugais en Asie, Afonso de Albuquerque (qui arriva en Inde en 1503, puis à Madagascar en 1505 et, pour bloquer le commerce maritime des Arabes, s'empara de Socotra à l'entrée de la Mer Rouge en 1506 et d'Ormuz à l'entrée du Golfe Persique en 1507 ; devenu vice-roi des Indes en 1509, il s'empara de Goa où il y mourut en 1515, mais auparavant il avait pris Malacca en 1511, permettant aux Portugais de commercer avec les Moluques et la Chine).
Puis ce sont les Espagnols qui, poussés par le prince Henri – dit Henri le Navigateur – se lancent dans la direction opposée, la route de l'ouest ("Buscar el Levante por el Poniente "). C'est Christophe Colomb qui va faire voile vers le couchant et découvrir en 1492 un continent qu'il croit fermement être tout à la fois l'Inde, le Cathay (la Chine) et la Cipango (le Japon), en un mot l'Inde fabuleuse décrite par Marco Polo. C’est la Terra nova (cf le Ptolémée de 1541 de Villanovano), dite aussi America (en hommage à Amerigo Vespucci) et finalement Amérique. On peut également citer les frères Vicente Yáñez Pinzon et de Solis (qui découvre l’Amazone en janvier 1500), le Florentin Amerigo Mateo Vespucci (digne successeur de Magellan aux Amériques ; ayant quitté Lisbonne en mai 1501, il débarqua sur la "Terre Ferme" entre le Venezuela et le Brésil, cf. Mundus Novus, lettre du navigateur), Juan Ponce de Léon (qui débarqua en Floride en 1513), ou encore Vasco Núñez de Balboa (qui, le premier, voit la Mar del Sur – autrement dit l’océan Pacifique – en 1513).
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Vasco de Gama |
Alfonso de Albuquerque |
Henri le Navigateur |
Christophe Colomb |
Vicente Y. Pinzon |
Amerigo M. Vespucci |
Vasco N. de Balboa |
Le 7 juin 1494, la Castille et le Portugal signent le Traité de Tordesillas, destiné à fixer les limites de domination respectives des deux puissances coloniales sur les terres nouvellement découvertes. Ce traité est aussitôt approuvé par le Pape Alexandre VI. Une ligne méridienne passant à 370 lieues des îles du Cap Vert est tirée, qui donne au Portugal – dans la direction du Levant – toutes les terres découvertes ou à découvrir et – dans la direction du couchant – à l’Espagne toutes les autres terres. Le Portugal avait en effet exigé que lui soit concédé le Brésil dans son entièreté. De l'autre côté du monde, la ligne de démarcation – la Raya – passait au milieu de l'archipel des Moluques, alors appelées les "Iles du clou", où pousse effectivement le clou de girofle. Ces îles vont faire l'objet, pour leur possession, d'âpres disputes entre les deux royaumes, à coups de fausses cartes présentées par des géographes peu scrupuleux. |
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La Raya en océan Atlantique |
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En 1500, avec Cabral, les Portugais savent que le Brésil existe. Le Roi demande que la limite des mondes entre Espagne et Portugal soit reculée de 100 lieues à 370 lieues à l’ouest des îles du Cap Vert. Du coup, le Brésil et Terre Neuve tombent dans les mains du Portugal |
Les autres nations ne peuvent qu'enrager d'être écartées de ce partage qui donne le monde à Manuel Ier, roi du Portugal (1469-1521) et à Charles Quint, roi d'Espagne (1500-1558).
François Ier et Henri VIII d'Angleterre, eux aussi avides de découvertes et de possessions, vont se lancer sur mer à leur tour, mais sur des routes septentrionales, voire polaires, comme la route du Nord-Ouest, sur lesquelles ils vont se rencontrer et lutter. C'est là que débute l'histoire du Canada et plus tard de la Louisiane. Ainsi, réagissant violemment au traité de Tordesillas, François 1er dira «... le soleil luit pour moi comme pour les autres. Je voudrais bien voir la clause du testament d'Adam qui m'exclut du partage du monde»,... avant de soutenir l'expédition de Jacques Cartier. |
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